terça-feira, 28 de setembro de 2004

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L'Express du 27/09/2004
Les leçons d'Outreau
propos recueillis par Laurent Chabrun et Gilles Gaetner
Le procès d'Outreau devrait rester comme l'un des plus ahurissants fiascos judiciaires de l'après-guerre. Dès l'annonce du verdict, le garde des Sceaux a mis sur pied une commission d'experts chargée de proposer des solutions pour que plus jamais ne se renouvelle un tel dysfonctionnement. Présidé par le nouveau procureur général de Lyon, Jean-Olivier Viout - un magistrat unanimement reconnu par ses pairs - ce collège devrait rendre ses conclusions courant décembre. Dominique Perben a souhaité recevoir le lundi 27 septembre les sept acquittés du procès d'Outreau, dont deux ont effectué trente mois de détention provisoire. En exclusivité pour L'Express, le garde des Sceaux présente des pistes et des remèdes qui devraient être repris par la commission Viout

Qu'allez-vous dire aux sept acquittés d'Outreau?
D'abord, une remarque: à l'énoncé du verdict de la cour d'assises de Saint-Omer, j'ai ressenti comme tout un chacun beaucoup d'émotion. Aussi ai-je accepté de les recevoir sans la moindre difficulté, pour les écouter, bien sûr, mais également pour leur dire ma volonté, comme l'a souhaité le président de la République, de voir réhabiliter ces personnes dont la vie a été gâchée.
Elles veulent une indemnisation. Qu'envisagez-vous?
En ce qui concerne l'indemnisation pour détention provisoire abusive, il n'y a pas de problème. Elle est classique. Elle passe par le premier président de la cour d'appel, avec un recours toujours possible devant la commission ad hoc, composée de magistrats de la Cour de cassation. Les intéressés ont six mois pour introduire cette demande. J'imagine qu'elle est en train de se formaliser....
L'autre question est de savoir si, à l'occasion de l'affaire d'Outreau, il y a eu un dysfonctionnement de la justice, autrement dit une faute lourde...
Effectivement. Mais la réponse est très complexe. Aussi ai-je demandé à mes collaborateurs de mettre sur pied un groupe de travail pour examiner cette question avec les avocats des intéressés. Sans préjuger quoi que ce soit, on ne peut exclure une transaction qui interviendrait entre, d'une part, les ministères de la Justice et des Finances et, d'autre part, les victimes.
Venons-en à la problématique du juge d'instruction, dont l'enquête a été gravement critiquée.
Comme beaucoup de Français, j'ai été particulièrement affecté par l'accumulation de souffrances qu'a révélée ce procès. Je pense en particulier aux violences faites aux enfants martyrisés. J'ai le sentiment que garder toute l'objectivité, toute la retenue nécessaire dans ce genre d'affaire est extrêmement difficile. Aussi, je crois que la désignation d'un second juge d'instruction permettrait une plus grande sérénité dans des enquêtes de ce genre. En effet, la possibilité offerte au juge de parler avec un de ses collègues, de partager à deux la responsabilité de l'enquête constitue une garantie essentielle. Elle permet d'alléger un fardeau beaucoup trop lourd pour un seul homme, surtout dans des dossiers à forte connotation émotionnelle.
Et les experts? Eux aussi semblent avoir eu des certitudes qui ont largement influencé le juge...
Vous avez raison. C'est une erreur à laquelle il faut remédier. Le partage des tâches entre experts et juges doit être scrupuleusement respecté. En aucun cas l'expert ne peut se substituer au magistrat: à chacun sa mission. L'expert doit répondre avec toute la compétence possible, ce qui suppose une formation continue et une pratique professionnelle effective. Quant au juge, il ne doit solliciter l'expert que sur des questions auxquelles ce dernier peut raisonnablement répondre. Mais il est indispensable que le juge garde sa liberté d'appréciation, quelles que soient les conclusions des experts.
Deux des acquittés ont effectué trente mois de détention provisoire. Deux autres, respectivement seize et vingt-quatre mois. Comment remédier à cet abus?
Je souhaite que, à l'avenir, toute personne placée en détention provisoire, depuis par exemple six mois, ait la faculté de demander à la chambre de l'instruction de la cour d'appel un réexamen de cette mesure. Ce réexamen devrait se dérouler en audience publique. J'attends sur ce point capital des propositions de la commission présidée par M. Jean-Olivier Viout.
Abordons la parole de l'enfant victime de violences sexuelles. Le procès d'Outreau a montré qu'elle pouvait être sujette à caution. Quelles solutions adopter pour que cette dernière soit la plus proche de la vérité?
Pendant de nombreuses années, on a beaucoup critiqué, y compris chez les juges, l'absence de prise en compte de la parole de l'enfant. Je vous le dis franchement: ma hantise est que les conséquences de cette affaire ne débouchent sur un retour en arrière. En clair, que de nouveau ne se profile une attitude de suspicion à l'égard des témoignages des enfants.
Précisément, comment garantir les bonnes conditions de recueil de la parole de l'enfant?
D'abord, je pense qu'un enregistrement de ses propos et un suivi de l'évolution dans le temps de ceux-ci constitueraient une avancée. Mais, surtout, les unités médico-judiciaires composées de médecins compétents devraient permettre de recueillir cette parole dans des conditions juridiques incontestables. En particulier si ce témoignage intervient au plus près des sévices dont l'enfant a été victime. J'ai mis en place l'expérience à Chalon-sur-Saône. Elle s'est poursuivie à Mâcon, Béziers, Aix-en-Provence et Saint-Nazaire. Elle devrait avoir lieu bientôt à Chartres et Lyon. Je souhaite que, dans le ressort de chaque tribunal, il y ait de telles unités.
La presse semble parfois avoir fait des commentaires hâtifs. Comment les éviter?
Effectivement, dans ce procès d'Outreau, la communication institutionnelle a cruellement fait défaut. Certes, il est normal que les avocats donnent leur point de vue aux journalistes. En revanche, ce qui ne l'est pas, c'est que l'institution judiciaire ne puisse faire œuvre de pédagogie. Expliquer comment ça se passe, pourquoi c'est comme ça. Aussi, pour l'avenir, je suis décidé, chaque fois qu'aura lieu un procès important, qu'un représentant du parquet soit à la disposition de la presse pour expliciter les choses. Non pas celui qui est acteur dans le déroulement de l'audience, mais quelqu'un d'autre faisant partie de l'équipe du procureur de la République.

Nota: O caso Outreau, envolvendo crimes relacionados com pedofilia e considerado o maior fiasco da justiça francesa no período do pós-guerra, como se escreve no texto transcrito, gerou uma significativa controvérsia social. As considerações que atrás se reproduzem são também relevantes para o nosso ordenamento jurídico e para as nossa práticas judiciárias. O Ministro da Justiça francesa recebeu, ontem, os sete arguidos declarados não culpados numa pública manifestação de reabilitação e reparação.

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